Boblée, de son vrai nom Lansana Camara, est un artiste guinéen évoluant à Montréal. Danser a toujours été son rêve. « C’est quelque chose qui m’appartient », affirme-il. Celui qui a obtenu son « talent de Dieu » danse depuis l’âge de huit ans et en vrai autodidacte. Issu d’une famille de dix enfants – son père avait deux femmes et il avait huit demi-frères et du côté de sa mère, ils sont deux – dans laquelle il est le seul artiste, Boblée aimait danser dans sa concession jusqu’au jour où il tapa dans l’œil.
– Quel est ton parcours ?
J’ai commencé à danser à l’âge de 8 ans. Personne m’a appris à danser. Il y a une dame qui organisait tous les samedis des concours de danse pour les enfants lors desquels elle donnait un prix monétaire de 500 francs guinéens au gagnant. Et c’est moi qui gagnais tout le temps. Lors d’un de ces concours, un homme, un manager d’un groupe de danse m’a vu danser. Il m’a alors recruté pour devenir danseur dans ledit groupe nommé BCBG de Raï. Au début, ma mère ne voulait pas que je l’intègre ; cependant, cet homme a réussi à la convaincre. C’était un groupe de coupé décalé populaire en Guinée.
J’ai ensuite fait partie du groupe de Hip-hop, Instinct Killer, le meilleur groupe de danse de la Guinée. Toutefois, deux des membres ont décidé de laisser tomber et je me suis retrouvé avec rien. Je rêvais de voyager pour montrer mon art car je savais justement que les guinéens étaient reconnus pour l’acrobatie et que ce genre de travail artistique avait permis à plusieurs personnes d’explorer au-delà des frontières. J’ai, par conséquent, commencé à m’entraîner à mes quinze ans au Centre d’arts acrobatiques Keïta Fodeba Tinafan. Et quatre ans plus tard, j’ai été choisi parmi des centaines d’acrobates pour participer à une tournée internationale avec Cavalia.
– Tu es danseur, acrobate, etc. Comment ces multiples talents se traduisent dans ton quotidien et où puises-tu ton inspiration ?
Je me dois de garder la forme car ça fait partie de mon travail. Au moins trois fois par semaine, je m’entraîne en équilibre et je vais au gym. Depuis le début de la pandémie, je m’entraîne avec des haltères à la maison et je fais ma routine d’abdos. Je fais souvent des vidéos de danse et ou d’équilibre que je partage sur les réseaux sociaux, entre autres, pour me faire connaître. C’est une source de motivation.
Je m’inspire beaucoup de la musique et de l’univers d’autres artistes comme certains danseurs que je suis sur les réseaux sociaux. J’aime aller à la recherche de nouveaux sons que je télécharge sur mon téléphone pour les écouter. Souvent, par semaine, je découvre un ou deux artistes et je parcours tout son répertoire. De la musique que j’ai entendue dans une vidéo sur TikTok puis cherchée sur YouTube en passant par celle que j’ai téléchargée depuis fort longtemps, j’ai environ un millier de chansons sur mon téléphone. Je regarde aussi des vidéos d’émissions comme America’s Got Talent. Et tout cela m’encourage à être plus créatif dans mes danses.
– Selon toi, comment la musique t’aide dans ton processus créatif et vice versa ?
Comme dit précédemment, la musique est une réelle source d’inspiration qui m’aide à me transporter dans un univers spécial où je crée des mouvements selon l’émotion qu’elle me fait ressentir. Elle m’est aussi d’une grande aide sur les réseaux sociaux car souvent, les gens qui interagissent sur mes vidéos l’apprécient tout aussi plus que mes sauts ou pas de danse. La musique va de pair avec ce que je fais et engendre une appréciation globale de mes performances et parfois même, elle peut être plus entraînante que le danseur (rires).
– Le plus gros challenge pour toi jusqu’à présent ? J
Avoir été dans Instinct Killer et subir une certaine trahison de mes anciens partenaires ont fait grandir ma volonté de toujours pousser pour devenir meilleur. J’aimerais être capable de vivre de mon art et je continue à m’entraîner pour participer à des événements/émissions plus reconnus comme America’s Got Talent, Révolution, … pour ne citer que ceux-là.
– Le conseil que tu n’oubliera jamais ?
Lâcher l’école pour poursuivre mon travail d’artiste a engendré la colère de mon père qui m’a, par la suite, appelé pour me dire ceci : « Vu que tu as décidé d’être artiste, il faut le prendre au sérieux. Vu que tu aimes ça, il faut le prendre au sérieux. ». Ce sont des phrases qui resteront gravées à jamais.
– Et celui que aurais aimé qu’on te donne ? Q
Avant de venir au Canada, alors que Cavalia était en pause, j’aurais aimé qu’on m’explique qu’il est difficile de vivre de son art sans support. La plupart des artistes travaillent à côté et font des spectacles de temps à autre. J’aurais aimé que quelqu’un me conseille de trouver un travail ou de faire une formation pour trouver un emploi plus spécialisé. Il n’est pas trop tard pour moi de le faire même si mon objectif est de vivre de mon art et ce, tout en sachant que c’est physique et qu’à un moment donné, je ne pourrai plus le faire.
– Quelles sont tes prochaines actualités ?
Je vais participer au Festival de la gastronomie africaine (Festiga) qui est un événement virtuel se tenant les 27 et 28 février. En novembre dernier, un ami vivant en Angleterre m’avait invité à collaborer dans un projet impliquant nos deux pays, avec notamment, deux artistes danseurs de l’Angleterre, deux homologues au Canada ainsi qu’une danseuse contemporaine et moi-même. Le projet intitulé Mandingue Horizons – Cymraeg/Québécois a été accepté par le British Council, Canada Council for the Arts, Farnham Maltings et The High Commission of Canada in the UK. Je suis très content d’en faire partie. Le livrable sera présenté sous forme d’une vidéo sur les réseaux sociaux vers la fin mars.
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