Venez découvrir un musée unique en son genre : le Dan Gerbo Museum. Il fait partie « des musées d’artistes » d’Alsace, à Mulhouse, pensé par l’artiste lui-même.
Cher.ère.s lecteur.rice.s de R Magazine, je vous présente un musée unique en son genre, car, dans la pratique muséale, un musée est fondé sur une impulsion politique. Comme le fut le Musée du Louvre, le Dan Gerbo Museum fait partie « des musées d’artistes » d’Alsace, à Mulhouse, pensé par l’artiste lui-même. Si nous devions penser notre rapport à la définition de l’art, nous aurions du mal à classifier l’œuvre de Dan Gerbo tant elle déconstruit le rapport premier que nous pouvons entretenir avec les canons artistiques de notre temps. La démarche poursuivie par le musée est de décloisonner l’accès à l’art. Regardons l’histoire des arts, nous pouvons voir que les mouvements se sont créés par la rédaction de manifestes, qui définissent une esthétique précise sur le canon artistique, comme les Manifestes du Surréalisme d’André Breton. Ce musée est innovant par le fait qu’il va proposer la location des espaces par les artistes. Si nous devions associer à ce musée un slogan, ce serait probablement celui-ci : « L’art est la recherche de la déconstruction des attendus ». Ce slogan représente bien le paradoxe des arts, c’est amener le spectateur à être attentif et à questionner son rapport avec l’art, tout en étant conscient, qu’il doit reconstruire la signification de l’œuvre. L’œuvre par essence, ne dispose pas d’un chemin unique d’interprétation.
Pour nous accompagner à comprendre la démarche qui préside la réalisation de cette démarche novatrice, Dan Gerbo, artiste et fondateur de ce musée, a accepté de répondre aux questions de R Magazine.
R Magazine : Quel est le concept derrière le Dan Gerbo Museum ?
Dan Gerbo : J’ai créé mon entreprise en 1984 et le musée est le résultat d’une vie de travail. C’est un musée qui est considéré comme un ERP (établissement recevant du public), un musée-galerie avec des espaces d’expositions qui seront mis à disposition par le musée pour les galeristes du monde entier, et pour la sélection des œuvres exposées, le comité de sélection décidera des artistes à exposer. Ce comité de sélection devra permettre de faire connaitre des artistes.
R Magazine : Pour vous, comment votre musée s’approprie-t-il la notion de patrimoine ?
Dan Gerbo : Le but est de créer une œuvre monumentale « LE REPOS DU GUERRIER » : un appel à la paix. C’est rappeler que l’art n’est pas politique : l’œuvre du repos du guerrier est une ode à la paix. L’avion représenté est un SEPECAT Jaguar, un avion franco-britannique. L’art devrait évoquer un message ou une symbolique, que ce soit esthétique ou non, dans un temps où la réflexion est mise sur pause.
R Magazine : Comment se présente la scénographie dans votre musée ?
Dan Gerbo : La scénographie est classifiée selon des thématiques. Il y a la thématique de la déconstruction des symboles du luxe ; le second thème touche à l’argent : avec le cercueil et les billets de banques ; et le troisième thème est en rapport avec la fragilité de la vie : avec des corps cassés, avec des cordes cassées, avec « le casse couilles » : de véritables testicules conservés dans du formol sous la menace d’un marteau qui risque de céder à tout moment.
Je participe à déconstruire le rapport aux totems de la vie moderne. Ce choix montre à quel point les personnes apparaissent attachées à ces symboles.
R Magazine : Quel.le.s sont les prochain.es.s artistes que vous souhaitez exposer ?
Dan Gerbo : Le choix ne m’incombera pas, mais je conserve un droit de regard avec mon comité de sélection sur les œuvres et artistes proposés et exposés dans le musée, les professionnels (historiens, professeurs de Lettres) qui mettront en valeur l’œuvre de Dan Gerbo, qui permettrait une meilleure vision de mon œuvre auprès du public.
Souvent, je préfère que ce soient des historiens de l’art ou même des spécialistes de littérature qui analysent mon travail. Cette analyse participe à l’enrichissement de la connaissance de mon art, car je pense que l’artiste est parfois un juge très sévère sur son œuvre. De ce point de vue, je souhaiterais que les personnes qui font de la littérature puissent rechercher pour mon comité de sélection, je souhaite faire appel à une diversité de personnes pour qu’il y ait des regards croisés sur mon œuvre.
R Magazine : Comment définiriez-vous la notion de l’art ?
Dan Gerbo : La définition de l’art n’est pas définitive et c’est au public d’interpréter mon art tel qu’il le perçoit et le ressent. L’interprétation n’est pas univoque et c’est au public et aux professionnels de construire leurs propres visions et interprétation de mon œuvre. La construction de la signification même de l’œuvre est changeante voire mouvante en fonction du regard que l’on y pose.
La problématique de la définition de l’art est la multiplicité de définitions que nous donnons à ce terme. Ce qui présente quelques difficultés quand on doit définir les frontières que nous pouvons attribuer à la notion d’art, et notamment à cause du numérique, qui bouscule la conception traditionnelle de l’art tel que nous l’avons connu jusqu’alors.
Avec Dan Gerbo, nous avons pu voir que la notion même d’artiste se trouvait modifier en ce qui concerne les bornes que nous pouvions apposer au terme même d’art. Que l’art contemporain redéfinît de façon claire et précise les missions que doit s’assigner l’art, c’est celui de renouer avec un art signifiant, un porteur de messages pour permettre aux spectateur.rice.s, spécialistes ou non, de s’attribuer le sens d’une œuvre et ainsi encourager le retour au sein des musées.
Sitographie :