Elsa Zylberstein et Rebecca Marder incarnent Simone Veil, dans ce film biographique réalisé par Olivier Dahan, Simone, le voyage du siècle (sortie le 12 octobre 2022). Un biopic extrêmement fort, dur parfois. Il dépeint le parcours extraordinaire d’une femme exceptionnelle qui a mis son histoire, sa voix et son énergie au service de la France, d’un idéal européen, au service des Français, des femmes, des opprimés et des oubliés.
Faisons le point sur cette personnalité à connaître et ce film à voir.
Simone Veil, combattante pour la dignité
La sortie cette année du film biographique Simone, le voyage du siècle réalisé par Olivier Dahan est l’occasion de revenir sur le parcours de Simone Veil, figure emblématique de la scène politique française et survivante de la Shoah.
Qui est Simone Veil ?
Simone Veil est née à Nice en 1927. Issue d’une famille juive, elle connaît une enfance difficile, marquée par la crise économique de 1929, puis dix ans plus tard, par la Seconde Guerre mondiale. Dès 1942, la famille Veil fait face aux lois stigmatisant le peuple juif et circule sous le nom Jacquier. Simone est arrêtée en 1943 quelques semaines après l’obtention de son baccalauréat. Avec des membres de sa famille, elle transite par le camp de Drancy avant d’être transférée au camp d’extermination de Auschwitz-Birkenau. Elle échappe à l’extermination en mentant sur son âge et est assignée aux travaux forcés. Par la suite, elle est envoyée au camp de Bobrek, puis de Gleiwitz et enfin de Bergen-Belsen où elle est libérée par l’armée britannique. À son retour en France, elle partage son témoignage, non seulement devant les caméras, mais aussi à travers son roman autobiographique, Une Vie, sorti en 2007. Elle se bat pour transmettre, partager, et entretenir la mémoire de son peuple. Finalement, sa vie est un témoignage du combat pour la dignité humaine.
Connu pour la réalisation des films La Môme (2008) et Grace de Monaco (2014), Olivier Dahan s’attaque à nouveau au portrait d’une femme qui a marqué la France et le monde. Elsa Zylberstein, dont la réputation n’est plus à faire, et Rebecca Marder de la Comédie française, âgée de 27 ans, se partagent le rôle de Simone Veil sur une ligne temporelle double. Nous suivons Simone Veil durant sa jeunesse, sa déportation, son retour dans la France d’après-guerre qui n’est pas prête au dialogue. Le film Simone, le voyage du siècle, relate très bien l’attachement de Simone Veil aux valeurs humaines. Nous pouvons voir à travers cette œuvre, trois enjeux qu’elle a défendus tout au long de sa vie.
La dignité… des juifs, victimes de la Shoah :
Ce sujet est sensible pour elle : victime de la barbarie nazie, endeuillée par la perte de certains membres de sa famille, Simone Veil relate cette souffrance qu’elle a vécue devant les caméras en 1976, et dans son livre autobiographique Une vie (2007).
Au-delà de son témoignage, elle s’est engagée pour faire vivre la mémoire de ce crime. Elle s’investit en tant que Présidente de la Fondation pour la mémoire de la Shoah entre 2001 et 2007. Cette structure « subventionne le Mémorial de la Shoah [à Paris et à Drancy] et soutient des projets qui permettent d’élargir les connaissances sur la Shoah, de venir en aide aux rescapés en difficulté, de transmettre l’héritage de la culture juive, de lutter contre l’antisémitisme et de promouvoir le dialogue interculturel ».[1] Simone Veil a participé aussi à rendre ce devoir de mémoire pertinent et juste. En 2008, elle s’oppose à la proposition de l’ancien président, Nicolas Sarkozy (2007-2012), de confier à chaque enfant de CM2 « la mémoire d’un enfant juif » mort durant la Shoah. Elle se justifie en expliquant que pour elle, un enfant de dix ans ne peut pas s’identifier à la souffrance d’une victime de la Shoah. Cela lui semble illégitime.[2]
La dignité… des prisonniers :
Son combat pour la dignité humaine l’amène à étudier le droit : elle obtient sa licence, puis le concours de la magistrature en 1956. Son histoire marquée par une succession de détentions lui donne une sensibilité pour le bien-être des prisonniers qui, selon elle, ont le droit d’être traités avec dignité. Elle devient ainsi haute fonctionnaire dans l’administration pénitentiaire au ministère de la Justice. Sous son impulsion, des centres médico-psychologiques sont créés dans les maisons d’arrêt. Elle se bat également pour la protection des prisonniers du FLN pendant la guerre d’indépendance d’Algérie. Elle joue un rôle très important dans l’évolution du traitement des prisonniers dans les maisons d’arrêt en France.
La dignité… des femmes :
Simone Veil est aussi connue pour son combat pour le droit des femmes et, notamment, dans le cas de la dépénalisation de l’IVG. En effet, en tant que ministre de la Santé sous la présidence de Giscard d’Estaing, elle porte ce projet à l’Assemblée nationale en 1974, une action importante pour l’autodétermination des femmes. À l’époque, 300 000 avortements clandestins étaient pratiqués chaque année, mutilant les femmes et les forçant au silence. Ce projet de loi crée un débat national, Simone Veil est alors confrontée à une vague de mépris et de haine de la part de ses collègues. Le texte est finalement adopté et entre en vigueur le 17 janvier 1975. Son combat pour le droit des femmes sur leur corps fait d’elle une figure féministe incontestée en France.
[1] La Fondation. Fondation pour la Mémoire de la Shoah [en ligne]. [consulté le 21 février 2022]. Disponible sur : https://www.fondationshoah.org/la-fondation
[2] La Shoah en CM2 : bonne ou mauvaise idée ? Lexpress.fr [en ligne]. 14 février 2008 [consulté le 24 février 2022]. Disponible sur : https://www.lexpress.fr/actualite/societe/la-shoah-en-cm2-bonne-ou-mauvaise-idee_470217.html
Idée d’Olivia Moran