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Quand Barbie devient muse

Les origines de Barbie

Après plusieurs projets dans le domaine de la reproduction de visages en céramique, Ruth Handler et son mari Elliot Handler cherchent à frapper fort ! Ils s’unissent à un autre designer du nom de Harold Matson et fondent, en 1945, la célèbre compagnie, Mattel. Au départ, l’entreprise produit des meubles en bois pour poupées, des armes miniatures et des jouets musicaux. En 1955, alors que Mme Handler est à la tête du marketing, ils deviennent sponsor exclusif du programme The Mickey Mouse Club, de la chaine ABC.

Barbie est fortement inspirée d’une poupée allemande, la Bild Lilli, imaginée par Rolf Hausser. En 1956, les Handler voyagent en Europe, découvrent ce jouet et décident d’en faire une réplique pour le marché américain. Mattel fait naître sa première poupée Barbie en 1959. Annoncée par les médias et très attendue par le public, elle est présentée à la foire de New York sous le nom de Barbara Millicent Roberts, nom de la fille des Handler. Elle n’est plus à présenter, Barbie, femme adulte d’une trentaine d’années et de 29 cm de hauteur. Ses cheveux sont blond platine et elle est vêtue exclusivement de noir et blanc. Tout est prévu pour que la poupée soit à son avantage sur les écrans de télévision qui ne diffusent pas encore la couleur.
À partir de là, le succès est florissant. En 1964, la Barbie américaine engrange des millions de dollars et rachète les droits sur la poupée Lilli du fabricant allemand. Rolf Hausser n’a plus le droit de produire sa poupée et fait faillite quelques années plus tard…

Bild Lilli

Les Barbie se multiplient : Barbie Ponytail (1959-60), Barbie Bubble Cut (1961-67), Barbie Fashion Queen (1963-67), Barbie Swirl (1964), Barbie American Girl (1965), Barbie Twist’n turn (1967). Ken, le boyfriend de Barbie est créé à partir de 1961. Il est nommé ainsi en référence au prénom du fils de Elliott Handler, Kenneth. Selon le monde imaginaire de Barbie, ils se rencontrent sur le tournage d’une publicité.

Dans les années 70, le corps et le visage de la célèbre poupée évoluent. 1971, voit Barbie Alerte à Malibu être commercialisée. Ses courbes sont plus galbées que jamais et son bronzage impeccable.

Barbie est le jouet phare des années 1980. Elle a des dizaines de métiers et tout autant de loisirs. Sa garde robe est infinie et évolue avec les époques.

Elle a une sœur, un petit ami, des animaux et beaucoup d’amies de toutes les nationalités et de toutes les carnations. Les Barbie ethniques se sont, elles aussi, largement diversifiées depuis 1960. Chaque petite fille semble pouvoir s’identifier à la poupée et faire jouer sa créativité.

Adulées par certains, critiquées par d’autres

Barbie est une icône. À ce titre, elle est souvent adulée ou détestée. Une chose est sûre, elle ne laisse pas indifférent. Depuis cinquante ans et malgré son succès planétaire, Barbie est vivement critiquée sur deux points principalement.

Des scientifiques reprochent à la poupée ses mensurations qui seraient 39% plus faibles que celles d’une anorexique. Ils parlent même du syndrome de Barbie depuis 1995, ce désir d’avoir une apparence et un style de vie semblable à ceux de la poupée. Les pédopsychiatres accusent Mattel de déformer l’image qu’ont les petites filles de leur corps. Elle incarne l’idéal féminin auquel les jeunes filles veulent ressembler. Je pense notamment à la tristement célèbre Cindy Jackson, « la femme sans âge », qui s’est fait faire 52 opérations de chirurgies esthétiques et réparatrices pour ressembler à sa poupée préférée.

D’autre part, le jouet de Mattel dégage une image de blonde écervelée. Les valeurs qu’elle véhicule sont controversées spécifiquement chez les féministes. Barbie est riche, elle fait du shopping et vit dans de somptueuses villas. Elle a des amies pour parler vêtements et manucure et son petit ami est un apollon. La Barbie met en lumière un monde basé sur le paraître où elle est une femme-objet et fantasme des hommes. L’exemple le plus frappant est celui de la chanson Barbie Girl du groupe Aqua. Barbie est une personne réelle, niaise ayant le rôle de femme-objet passive.

Trop souvent blonde, trop maigre, trop superficielle, Barbie a bercé l’enfance de bon nombre d’entre nous. Qu’on soit adepte ou non, elle est l’emblème du jouet des années 80-90. J’ai moi-même tenté de lui créer des vêtements personnalisés avec mon mince talent de couture, je lui ai coupé les cheveux ou fait des faux tatouages au marqueur. Je me rappelle avoir essayé de détourner le personnage. Jocelyne Grivaud est une artiste française, fan de la poupée blonde et qui a, elle aussi, personnalisé ses poupées de manière très agile.

Jocelyne Grivaud : Barbie ma muse

En novembre 1967, Jocelyne Grivaud reçoit sa première poupée Barbie. Elle grandit et les Barbie finissent dans une boite au fond du garage.

Des années plus tard, au cinéma, elle regarde le film La jeune fille à la perle, elle trouve les couleurs somptueuses et apprécie les lumières à tel point qu’elle décide de reproduire le célèbre tableau. Sa démarche est particulière. Elle introduit la plus célèbre des poupées dans des chefs d’œuvres de l’histoire des arts. Barbie devient une muse historique. Intemporelle, certes, elle fait carrément un bond dans le temps jusqu’à l’époque des pharaons.

Barbie inspirée de Néfertiti

Jocelyne se met alors à travailler sur son projet, chez elle, avec le matériel qu’elle a sous la main. Sa reproduction de La jeune fille à la perle voit le jour et le travail de recherche est à saluer. Elle se prend au jeu, encouragée par ses proches et s’attaque à d’autres chefs d’œuvres de l’histoire.

Elle dépoussière son coffre à Barbie d’antan, va faire les vide-greniers, et court dans les magasins spécialisés de tissus. Barbie est déshabillée, recoiffée, découpée et parfois même démembrée pour se plier au modèle. Une fois la mise en scène figée selon ses envies, elle la prend en photo et la retouche par ordinateur afin de la publier sur son site internet.

En 2009, pour les cinquante ans de la plus célèbre poupée du monde, sa production est dense. Sa démarche intrigue et elle se fait exposée à Marseille, en Italie ou en Chine.

Nous ne sommes pas toujours tendres avec la poupée blonde et Jocelyne Grivaud déplore ces critiques. Elle espère que son travail redorera son image. Sur son site, on peut lire : « Voici donc mon expo « perso », cadeau d’anniversaire de ma poupée fétiche superposée à la vision d’artistes dont j’aime particulièrement le travail. Qu’ils soient tous remerciés d’avoir créé de si fortes images, merci à Ruth Handler d’avoir imaginé cette « poupée mannequin » qui a enchanté mon enfance ». Barbie Statue de la Liberté, Barbie de Milo, Barbie Mona Lisa, autant de facettes encore inconnues. Avec Barbie tout est possible !

Laura Bonnieu (France – Canada)

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