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Le bus des femmes sans voix

Le samedi dernier, j’attendais patiemment à l’arrêt de bus quand une femme est arrivée en me souriant pour me dire que le bus était à l’approche. S’en est suivie une courte discussion sur le climat glacial.

Un homme caucasien arrive, bien vêtu avec un manteau qui faisait croire que le printemps était là alors que nous tremblions de froid, la madame et moi.

Début soixantaine, il nous sort dans un ton chaleureux : «Ah, mais il ne fait pas si froid que ça ! » ; ce à quoi nous répondons avec un sourire. Il enchaîne avec : « Regardez ce que je porte, juste une chemise manches courtes ».

Jusque-là tout va bien. Cela semble être une brève conversation entre trois individus que l’attente d’un bus a mis sur le même chemin.

Ce dernier se pointe, après des secondes qui semblaient interminables ; nous montons tous et je choisis d’aller m’asseoir au milieu, là où il y a des chaises cote-à-côte, car il n’y avait personne.

Monsieur le sexagénaire élégant et souriant décide alors de venir se mettre face à moi.

Dans un premier temps, je me dis qu’il rentre dans ma bulle mais après je reste respectueuse en me disant qu’il souhaite juste converser mais …

A un moment donné, je sens quelque chose sur mon genou. Je me dis « Non, non ! Il ne faut pas voir le mal partout !

Cela doit être surement juste une jambe. Je baisse la tête pour me rassurer que c’est juste un mauvais jugement de la situation même si au fond de moi, je savais que c’était pas le cas. C’est là que je remarque son manège avec son manteau. Monsieur ouvrait ce dernier pour cacher, de la vue des autres passagers, son acte ignoble et répugnant : il frottait la preuve de sa masculinité sur mon pauvre genou.

En l’espace de quelques secondes qui, selon moi, ont duré une éternité, je me suis mise à réfléchir sur quelle réponse verbale ou physique je devais apporter. J’étais une femme sans voix ! Et pendant ce temps, Monsieur renchérit avec : « Aurais-tu 10 mns pour aller quelque part avec moi…. J’aime les femmes noires. », avec un haussement des sourcils.

Je décide alors de prendre la parole car physiquement, musculairement, je ne fais pas le poids. Et surtout, je suis civilisée ; donc, je me retiens mais bordel que j’avais envie de lui mettre mon poing dans la face. Donc, prenant mon courage à deux mains, je lui dis tout doucement : Si vous ne dégagez pas du bus tout de suite, je vais crier.

Là, il demande l’arrêt et descend comme si de rien n’était.

Pendant le reste de mon trajet, je vois qu’une jeune femme qui était assise en face avait capté la scène mais n’avait pas bronché. Une autre femme sans voix ! Et cela rajoutait de la frustration à mon agression. Je préfère taire, pour le moment, les autres aspects de cette situation et je pensais à la jeune fille qui aurait été à ma place sans avoir la force de se rebeller. Qu’aurait-il advenu d’elle ?

On se dit toujours, « Ah, si tel ou tel me fait ça, je vais lui faire ceci ou cela ». Mais, croyez-le ou pas, je suis une grande gueule et là, je me suis sentie vulnérable, diminuée, salie.

En cette journée internationale des droits des femmes (disent-ils), ces agissements qui déshonorent notre race montrent que les conditions féminines sont bafouées.

Nous, femmes, nous devons toujours et encore nous battre pour obtenir le respect qui nous est dû. Dans combien de pays, mes consœurs sont sans cesse considérées comme des êtres inférieures avec plein de devoirs et peu de droits ? Combien de femmes vivent sans liberté, sous la coupe d’un mari violent ?

Nous sommes au 21ème siècle, bon sang !

Je ne suis pas féministe. Mais si être féministe est vouloir éradiquer la position fragile de la femme dans la société alors je veux bien porter ce foulard féministe.

Toutes ces journées mondiales et internationales ne sont que la représentation de la présence d’un problème. Nous devons agir, nous femmes, bien évidemment, pour nous faire respecter. Nous ne devons plus nous taire afin que cette journée n’existe plus.

Aujourd’hui, nous devons saluer le combat mené jusque-là par nos aînées tout en réalisant que le chemin est encore long. Arrêtons de croire que nous ne pouvons agir car le combat est perdu d’avance. Soyons solidaires et battons-nous ensemble !

Comme dirait ma très chère tata-mentor, Hulo Guillabert : « Prenons le pouvoir ! »

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